27 juin 2024

Jean-Yves Mas-Baglione : Peux-tu revenir sur les débuts de ta carrière de professeur de Sciences économiques et sociales (SES) dans les années 1970 ? Qu’as-tu fait comme études à la fac ? Qu’est ce qui t’a amené à passer le Certificat d’Aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (CAPES) de SES ? Comment et pourquoi devient-on professeur de SES dans les années 1970 ?

Jean-Yves Mas-Baglione
Professeur de SES (93), doctorant en sciences de l’éducation

Christian Laval
Professeur émérite de sociologie à l’Université Paris Nanterre

Christian Laval : J’ai passé le CAPES de SES en 1978 après des études un peu en zig zag, licence de lettres modernes après une hypokhâgne, puis licence et diplôme d’études approfondies (DEA) de sciences économiques à Nanterre. Plus tard, je reprendrai des études à Paris 8 en psychanalyse. J’ai pris mon temps. Je ne savais pas bien quelle profession embrasser, et d’ailleurs en embrasser une n’était pas la priorité absolue ! Il faut se replacer dans la décennie 1970, très différente des suivantes. Je participais d’une génération (j’avais 15 ans en 68) où la priorité était la perspective de la révolution. Petit ado, j’ai été anar-écolo-beatnik, puis militant trotskiste un peu marginal dans mon organisation, avec des ambitions intellectuelles déjà assez démesurées : combiner « l’avant-garde politique », ce que nous appelions le « marxisme révolutionnaire », et « l’avant-garde artistique et théorique ». Cela fait bien sûr écho à ma double formation, économique et littéraire, très liée elle-même à cet engagement précoce. Passer le CAPES a été « une histoire de copains », un petit groupe d’étudiants en sciences éco de Nanterre désireux de rester un peu plus longtemps ce qu’ils étaient devenus sans savoir très bien dans quoi ils s’engageaient. Un peu faute d’autre chose, les SES, dont nous ne connaissions à peu près rien, nous semblaient une suite possible de nos engagements et de nos intérêts, mais de façon vraiment très floue. Nous savions un peu intuitivement que nous avions les capacités de réussir le concours si nous préparions un peu sérieusement. J’ajoute qu’aucun enseignant de fac ne nous en avait parlé. Brouillard presque complet donc. En réalité, j’avais fait une tentative de recherche, en DEA, mais qui a échoué. L’enseignant qui l’encadrait m’a dissuadé de continuer en notant assez mal mon mémoire qui portait sur « la planification culturelle sous la Ve République », une lecture très foucaldienne qui interrogeait la stratégie de neutralisation sociale qui présidait à cette politique culturelle. Ça n’avait pas plu, parce que la « Culture » était intouchable pour un humaniste de gauche comme lui. C’est une occasion ratée, que j’ai mis trente ans à rattraper ! Je le regrette d’autant plus que cet enseignant animait un cursus de troisième cycle intitulé « Économie et société » qui ouvrait des horizons fantastiques, non sans rapport justement avec ce que faisaient parallèlement les SES que je découvrirai plus tard.

C’est avec le CAPES que j’ai pu vraiment réaliser où je mettais les pieds, quand j’ai compris que cette discipline et cette profession étaient totalement « faites pour moi », si je puis dire. Ce qui allait dans le sens de ma manière d’être, c’est la formidable ouverture intellectuelle que permettaient les SES sur la sociologie, l’histoire, la psychologie sociale (option que j’avais prise). Les SES, dès la préparation du concours, cassaient le risque de monolithisme économique que nous avions subi et contesté dans nos cours. C’est ce qui m’a le plus séduit, parce que j’étais déjà à la recherche de ça.

On a dit, c’est un peu un cliché générationnel, que les SES ont été à ce tournant des années 1970 un mode de conversion du « capital militant » en « capital professionnel »[1]. Ce n’est pas faux, mais il ne faut pas voir cette conversion comme un investissement politique que l’on aurait placé dans la profession, c’est aussi une affaire de transformation personnelle et intellectuelle. Dans « conversion », il faut entendre non pas un renoncement à ce que nous avions été et ce que nous avions fait comme militant mais à la fois un prolongement de nos engagements et une modification de notre ethos, pour employer un grand mot.

Les SES ont été un refuge pour des esprits un peu rebelles, un abri pour la pensée critique, sûrement un pôle de résistance à l’idéologie néolibérale en politique et à la normalisation néo-classique dans les facs d’économie qui ont semblé tout emporter dans les années 1980 et 1990. Vingt ans donc qui ont eu le sens pour moi de la possibilité d’une position critique au milieu de la grande vague réactionnaire. Aujourd’hui, avec ce que l’on sait des dégâts irréversibles de cette idéologie et de cette normalisation sur la société et sur la planète, on peut mieux mesurer de quel effet de salubrité publique a été porteur cet enseignement en France et combien il a été essentiel de le défendre.

Quand et pourquoi as-tu adhéré à l’Association des professeurs de SES (Apses) ? Peux-tu évoquer le rôle de l’Apses dans les années 1970/1980 ? Quels étaient à l’époque les combats que vous meniez ?

Cela peut te paraître bizarre, mais je n’ai pas de souvenir très précis de cette époque. Dans mon premier poste à Liévin (Pas-de-Calais), entre 1979 et 1981, j’étais avant tout un syndicaliste du Syndicat national des enseignements de second degré (SNES) et de l’École émancipée, ce qui était cohérent avec mon parcours antérieur. Je me souviens, néanmoins, que ce qui a uni dans une étrange bataille les professeurs de SES, c’était une nouvelle mouture du projet de faire avaler les SES par l’Économie-gestion. Un très vieux projet que l’Apses et les syndicats ont réussi à faire échouer à plusieurs reprises. Ce devait être en 1980, mais je n’ai pas en tête les archives des mauvais coups qui ont été portés aux SES. J’ai encore quelque part la photo de la Voix du Nord où une vingtaine ou une trentaine de profs de SES manifestent devant le rectorat de Lille. Et j’étais pour l’occasion le seul gréviste dans le « Lycée des manufactures » de Liévin.

Tes premiers textes, assez « pointus », portent sur Jeremy Bentham ? Pourquoi t’es-tu intéressé à Bentham qui reste un penseur assez méconnu ou mal connu en France ?

On arrive aux années 1980. Après Liévin, je suis muté aux Mureaux dans les Yvelines, je vais y rester jusqu’en 1994. C’est pendant cette période, durant une quinzaine d’années donc, que je suis devenu une sorte de spécialiste français de Jeremy Bentham, publiant des petits livres dans des collections de philosophie et des traductions, finissant par co-fonder un Centre de recherche interdisciplinaire à Nanterre, le Centre Bentham, maintenant hébergé à Sciences Po. C’est une période très féconde et très bizarre aussi, car je devais conjuguer mon travail de professeur du secondaire et des activités de recherches assez déconnectées de cette activité professionnelle, le tout sans les avantages du statut d’enseignant-chercheur, absence qui pose d’énormes problèmes pour participer à la vie de la recherche , surtout à un niveau international. Beaucoup de collègues du secondaire et du primaire qui sont engagés dans la recherche connaissent cette galère car il n’y a aucune reconnaissance institutionnelle de cette double activité et des contraintes qui lui sont liées.

Ceci dit, pour répondre à ta question, je dirais ceci. Dès mes études d’économie, j’ai été frappé par ce qu’on peut appeler le fondement anthropologique de l’économie, le visage de l’homme qui est à la base du raisonnement économique. Certaines lectures ont été assez décisives, notamment Maurice Godelier, Rationalité et irrationalité en économie (Godelier, 1966), ou encore Cornelius Castoriadis, L’institution imaginaire de la société (Castoriadis, 1975). Dès ce moment-là, je me suis dit que pour que la critique soit radicale, il fallait aller à la racine comme dit Marx, c’est-à-dire faire l’histoire de cette idée fondamentale de l’homme. Et j’ai progressivement découvert que Bentham, dont on parlait peu, dont on méconnaissait à peu près tout à l’université, était le principal fondateur de l’utilitarisme, un auteur et un courant de pensée qu’il fallait connaître absolument. J’étais surtout frappé et donc motivé par la non coïncidence entre trois Bentham si je puis dire. Le Bentham de l’anti-utilitarisme de la Revue du Mouvement anti-utilitariste en sciences sociales (MAUSS) dont j’ai été l’un des premiers lecteurs fidèles jusqu’à aujourd’hui ; le Bentham de Foucault, celui du Panoptique, toujours fascinant et pertinent ; et le Bentham de Lacan beaucoup plus bizarre – celui-là m’a passionné –, de la théorie des fictions. Je voulais savoir comment fonctionnait cette curieuse machine théorique qu’a été Bentham, que je continue à regarder comme l’un des auteurs très importants si l’on veut comprendre le socle anthropologique de l’Occident capitaliste.

Mais il y a une donnée que je dois rappeler. À mon retour dans la région parisienne, je décide de reprendre des études cette fois à Paris 8 dans le département de psychanalyse. Je fais une analyse personnelle depuis la fin des années 1970, et j’ai le désir de me former professionnellement à cette discipline pour éventuellement devenir moi-même psychanalyste. Je vis avec une amie psychologue, et dans un milieu où la psychanalyse est une sorte de bain naturel. C’est dans ce cadre que je vais travailler à un mémoire de DEA, qui par sa dimension valait bien une thèse, et qui était consacré à une lecture lacanienne de Bentham. Je l’ai réduite à un petit livre paru aux Presses universitaires de France (PUF) en 1994, Jeremy Bentham, Le pouvoir des fictions (Laval, 1994). J’ai bien tenté avec ces travaux de m’insérer dans des réseaux de recherche, notamment d’obtenir un détachement dans un laboratoire grâce au CNRS, mais malgré l’appui généreusement offert par Bourdieu qui avait beaucoup apprécié ce travail, cela n’a pas marché.

Le bilan de cette « période Bentham » est mitigé. Avec quelques chercheurs, notamment le philosophe Jean-Pierre Cléro, nous n’avons peut-être pas fait progresser de manière sidérante la connaissance de Bentham en France, qui reste bien inférieure ici à ce qu’elle est en Angleterre ou aux États-Unis, pays où il est considéré comme un « classique ». Mais nous avons du moins produit des instruments pour qui aimeraient en savoir plus sur cet « incontournable ».

Ce qui m’a toujours frappé dans tes ouvrages, c’est le souci de croiser vraiment les différentes sciences sociales (l’économie, la sociologie, les sciences politiques voire la philosophie politique) comme le revendique le projet fondateur des SES ? Y-a-t-il un lien entre les principes épistémologiques sur lesquels reposent tes recherches et l’objectif de croisement disciplinaire revendiqué par le préambule du programme de SES de 1967 ?

Je n’ai jamais réfléchi en termes de lien de ce genre, mais c’est une bonne question. Cela tient d’abord à ma propre libido sciendi, pour parler le latin de Bourdieu, que j’appellerais plutôt une sorte de maladie de l’éclectisme. Mais, plus noblement, je peux croire qu’il y a là une sorte de fidélité au projet fondateur de la sociologie, non pas d’être une discipline sociale parmi d’autres mais de constituer une science sociale générale. C’est le projet en tout cas des fondateurs de la sociologie. Le vrai paradoxe historique, c’est qu’une discipline du secondaire ait réussi à être plus fidèle à ce projet fondateur que les disciplines spécialisées au niveau universitaire. Et ceci tient bien sûr à l’influence inaugurale des membres de l’École des Annales sur cette discipline – je pense notamment à Marcel Roncayolo –, eux-mêmes grands héritiers de cette ambition d’une science sociale générale. Le programme des SES de 1967, c’est l’adaptation tactique de ce projet, qui restait l’horizon stratégique des Annales.

Il ne faut pas oublier non plus que le « croisement des disciplines » et le « pluralisme des paradigmes », deux points doctrinaux fondamentaux des SES, étaient initialement subordonnés à un point de vue historique qui constituait le cadre épistémologique des SES, et qui est, je crois, encore la seule manière juste d’envisager la possibilité même du « croisement » de différentes disciplines pour rendre compte du présent. La contextualisation historique, sociale, institutionnelle et idéologique des « regards théoriques » sur la société qui étaient convoqués permettait sur le plan épistémologique de dépasser le relativisme un peu mou des consignes inspectorales que l’on nous a transmis à partir des années 1980. Ceci dit ce relativisme assez lâche continue de valoir mille fois mieux que les œillères disciplinaires de l’université en matière de connaissance de la réalité.

Dans les années 1990, la place de la sociologie dans les programmes de SES est revue et augmentée : les auteurs phares des sciences sociales figurent explicitement dans les programmes et dans l’enseignement de spécialité (Weber, Durkheim, Schumpeter, Tocqueville, Bourdieu…). Or, à la même époque tu publies L’ambition sociologique (Laval, 2002), ouvrage dans lequel tu proposes une relecture des classiques de la sociologie à l’aune des principes de l’anti-utilitarisme… donc hasard ou nécessité ? Y a-t-il à l’époque (dans les années 1990) une volonté explicite d’ancrer les SES par rapport à ces penseurs ? Peut-on dire que ce projet prolonge les principes du projet fondateur des SES puisque tu proposes une lecture des classiques qui montrent qu’ils essaient tous de freiner le développement de l’utilitarisme sur lequel repose globalement la théorie économique néo-classique ?

Non, je n’ai pas du tout associé la rédaction de cette histoire de la sociologie classique, qui s’intitule L’ambition sociologique, et les changements du programme de SES qui à travers les options faisaient alors une place importante aux auteurs que tu cites. Pour le coup, je crois qu’il n’y a pas de lien. J’ai d’ailleurs donné à des fondateurs de la sociologie comme Saint-Simon ou Comte un rôle essentiel alors que ces deux auteurs sont quasi inexistants dans les références des SES, ce qui est dommage, même si je sais très bien qu’on ne peut tout enseigner.

L’histoire est très différente. Au milieu des années 1990, je me décide enfin à faire une thèse et l’occasion m’en est donnée par une conversation avec Alain Caillé, le créateur du MAUSS et le directeur de la revue du même nom. Je lui propose de faire une histoire intellectuelle et politique de l’utilitarisme (il connaissait mes travaux sur Bentham), et de la contre-offensive sociologique. Cette description d’un grand combat sur plusieurs siècles entre des conceptions très contrastées de l’homme et de la société était un projet complètement dément. Je l’ai heureusement réalisé à temps. J’ai accumulé une masse de matériaux pour écrire ma thèse, qui donnera ce livre L’ambition sociologique, dont la première édition date de 2002. J’ai commencé par la fin si je puis dire. Je publierai plus tard, en 2007, L’Homme économique (Laval, 2007), qui est en réalité la première partie de ce projet démesuré conçu dix ans avant.

Les deux parties sont complémentaires. Toutes les deux sont une révolte érudite, si je puis dire, contre la réduction de l’individu et de la vie sociale à la figure de l’homme économique, un réductionnisme sans lequel le capitalisme n’aurait pu connaître pareille expansion.

J’ai ici un regret à formuler. Je crois que mes collègues enseignants de cette discipline auraient eu beaucoup plus intérêt à considérer les efforts qui étaient faits pour réactualiser le projet d’une science sociale générale, notamment du côté de la Revue du MAUSS, et ce depuis les années 1980. Seule une minorité en a tiré profit. L’Apses en tant que telle ne m’a pas semblé nouer suffisamment de contacts dans son histoire avec ces problématiques. Pour ma part, avant cet entretien que je fais avec toi, jamais l’Apses ne m’a contacté à propos de ce travail qui était pourtant dans l’esprit des SES ainsi que tu le suggères.

Par la suite, tu publies un certain nombre d’ouvrages qui tous analysent les grands concepts qui vont irriguer la pensée critique dans les années 2000 et 2010 : l’anti-utilitarisme (Laval, 2002), le néolibéralisme (Laval, 2007), le retour à Marx (Dardot et Laval, 2012), les communs (Dardot et Laval, 2014). Peux-tu nous expliquer pourquoi tu estimes à la suite de Foucault, que le néo-libéralisme est la grande question politique actuelle ? Peux-tu rappeler d’ailleurs en quoi le néo-libéralisme diffère du libéralisme ?

Tout ça arrive plutôt dans les années 2000. Il faut bien comprendre le contexte. Le néolibéralisme a suscité assez tôt des résistances en France, sur le plan social et politique, mais aussi sur le plan théorique. J’ai parlé déjà de la Revue du MAUSS, qui a fait un travail précoce. Et puis sont venus des économistes hétérodoxes qui critiquent « l’économie-fiction » ou la « pensée unique », ou encore « le cercle de la raison ». Bourdieu également s’engage plus ouvertement dès le début des années 1990 dans ce combat contre le néolibéralisme, et de belle manière. La Misère du monde (Bourdieu, 1993), deux ans avant le mouvement gréviste de 1995, a fait date. Le fossé s’aggrave entre une sociologie qui retrouve ses accents anti-utilitaristes et une pensée économique dominante arc-boutée sur des dogmes qui deviennent peu à peu des réalités vécues par des millions de gens. Le « croisement des regards » et la « pluralité des paradigmes » en SES sentent le soufre. D’ailleurs la droite, le Mouvement des entreprises de France (Medef), la presse économique, certains cercles d’économistes universitaires avec des relais dans l’inspection de SES, le savent bien, eux qui militent ouvertement pour un reflux de la sociologie dans les programmes au bénéfice d’une conception normalisée de l’enseignement directement inféodée à « l’objectivité scientifique » des départements universitaires d’économie. Les SES n’ont pas été épargnées par cette grande régression, et jusqu’à aujourd’hui. Je le redis, la persévérance dans la défense collective des SES est l’une des plus belles choses à laquelle il m’a été donné de participer, même si nous n’avons pas réussi à approfondir la logique impulsée par les créateurs de la discipline dans un contexte historique aussi idéologiquement défavorable.

L’anti-utilitarisme de la sociologie classique ne suffisait pas à saisir la particularité historique du néolibéralisme, pas plus que le marxisme ou le néokeynésianisme d’ailleurs. Militant de l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac), un moment membre de son conseil scientifique, syndicaliste et chercheur à l’Institut de recherche de la Fédération syndicale unitaire (FSU) depuis la fin des années 1990, je n’étais pas satisfait des outils de compréhension du néolibéralisme à notre disposition. On avait de trop vieilles lunettes qui n’étaient pas adaptées. On réduisait le néolibéralisme à un « retour d’Adam Smith », ou bien encore au triomphe de l’École de Chicago ou encore au monétarisme de Milton Friedman. Il a fallu la publication en 2004 d’un cours de Michel Foucault au Collège de France tenu en 1979, Naissance de la biopolitique (Foucault, 1979), pour qu’on commence à y voir plus clair. Foucault explique que le néolibéralisme n’est pas seulement une politique économique, monétaire ou fiscale, mais un mode de gouvernement des individus et des sociétés qui suppose la création de dispositifs juridico-politiques nécessaires au fonctionnement du marché. Le néolibéralisme, dès sa naissance dans les années 1920 et 1930 se veut une refondation du libéralisme sur de nouvelles bases, et c’est au moins pour certains des courants qui l’alimentent une cassure avec le spontanéisme ou le naturalisme des libéraux classiques. Pour Foucault, le néolibéralisme est une véritable stratégie de pouvoir qui fait de la logique du marché, la concurrence, et du modèle de l’entreprise, une manière générale de conduire les individus et ceci par le moyen d’un jeu d’incitations plus « économiques » sur le plan des moyens mobilisés que le commandement direct, la coercition et la répression. Cette analyse de Foucault est particulièrement féconde car elle permet de rendre compte d’une part des transformations de la forme et de la fonction de l’État et d’autre part de l’extension illimitée de cette « gouvernementalité néolibérale » à toute la société bien au-delà du champ de l’économie stricto sensu. C’est en partant de ces intuitions qu’avec Pierre Dardot nous avons entrepris une relecture de l’histoire et de l’extension des modes de gouvernement néolibéraux dans La Nouvelle raison du monde (Dardot et Laval, 2009).

Outre ton travail sur les « classiques » des sciences sociales, tu étudies aussi de très près des auteurs plus proches de nous comme Bourdieu, Foucault, Castoriadis (voir bientôt je crois Deleuze et Derrida). Pourquoi est-ce si important pour toi de toujours revenir aux grands auteurs ?

Si tu le permets, je voudrais rester un instant sur cette question du néolibéralisme. Il y a des auteurs dans la mouvance néolibérale qui ont été complètement mis à l’écart dans l’enseignement universitaire d’économie, un peu moins en philosophie politique, et des auteurs qui sont pourtant de toute première importance comme Hayek par exemple, sans parler des ordolibéraux allemands sans lesquels on ne comprend pas la nature de la construction européenne depuis ses origines. C’est une lacune énorme, qui commence à être comblée grâce à des travaux d’historiens, de sociologues et de philosophes. Les SES qui, en économie, sont restées trop dépendantes de l’étroitesse de l’enseignement universitaire sont donc également victimes de ces lacunes.

Je reviens à ta question. Le projet que nous avons développé avec Pierre Dardot, et qui est un parmi un vaste ensemble de travaux, veut contribuer au renouvellement de la pensée critique. Cela passe par une relecture attentive de l’œuvre de Marx, mais aussi par le réexamen critique et l’usage des analyses des auteurs qui ont des choses importantes à dire sur notre présent. C’est ainsi que je me suis demandé ce que Foucault et Bourdieu avaient à nous apporter pour la compréhension du néolibéralisme dans un même livre (Laval, 2018). Ces auteurs ne sont pas pour moi des « maîtres à penser » ni même des chefs d’école, mais des ressources intellectuelles. Peut-être les rapports libres que j’entretiens avec ces auteurs ont-ils à voir avec les pratiques des SES, qui sait ?

Parallèlement à tes ouvrages sur l’histoire des idées, tu publies un certain nombre d’ouvrages plus accessibles sur l’école, notamment au début des années 2000, L’école n’est pas une entreprise (Laval, 2004) , au moment où les attaques du Medef sur l’enseignement des SES deviennent de plus en plus frontales. Y-a-t-il un lien entre la publication des ouvrages qui dénoncent le « néolibéralisme scolaire » et l’offensive libérale sur les SES ?

Un autre pan de mes intérêts porte sur les transformations des systèmes éducatifs sous l’effet des politiques néolibérales. Je m’y suis intéressé dès les années 1980-1990 en tant qu’enseignant de lycée et syndicaliste, mais aussi comme chercheur sur l’utilitarisme. Bien sûr les attaques dont tu parles m’ont motivé mais j’ai tenu à les mettre en perspective en prenant en compte une transformation plus large des systèmes éducatifs. Ce qui m’a frappé assez tôt c’est la montée d’un discours de plus en plus utilitariste en matière d’éducation au sein même de l’école publique, et puis la mise en place d’outils managériaux et des logiques de marché scolaire. Tout le corps enseignant et au-delà pouvait s’apercevoir qu’il se passait quelque chose, mais les mots exacts manquaient pour dire de quoi il s’agissait. Je n’avais pas les concepts non plus. J’ai accumulé les observations et les lectures pendant une quinzaine d’années, j’ai lu beaucoup d’auteurs anglo-saxons, pionniers dans le domaine parce que leurs systèmes éducatifs étaient en proie avant le nôtre à ce genre de politiques, j’ai beaucoup pratiqué la « littérature grise » des organisations internationales, des administrations nationales et des gouvernements. J’ai travaillé un moment avec Robert Ballion, l’auteur des Consommateurs d’école (Ballion, 1982). Mais ses premières analyses sur les marchés scolaires naissants étaient encore trop restreintes. Avec le temps, et parallèlement à mes recherches sur le néolibéralisme, je crois avoir mieux cerné « le devenir entreprise » de l’école. Il est inséparable d’une transformation néolibérale des formes d’intervention publique. Sur ce point, et sous un angle sociologique, Bourdieu a montré l’essentiel. Je lui dois beaucoup. L’important était de réactualiser l’analyse des modes de reproduction sociale par l’école dans le nouveau contexte mondial du « marché mondial de l’éducation » comme on commençait à dire en hauts lieux. Ce travail au début solitaire est devenu de plus en plus collectif à partir de mon engagement dans l’Institut de recherches de la FSU à la fin des années 90. Notre collectif de recherche a publié un premier livre, Le nouvel ordre éducatif mondial en 2002 (Laval et Weber, 2002) qui a eu un écho assez important, et nous n’avons pas cessé de reprendre ce sujet jusqu’à la synthèse de La nouvelle école capitaliste en 2011 (Clément et al., 2011).

C’est dans le cadre de l’Institut de recherches de la FSU, mais aussi en tant que membre de l’Apses et d’Attac, que j’ai cherché au début des années 2000 à construire une coalition, qui n’a malheureusement pas tenu dans le temps, destinée à défendre l’enseignement des SES dans l’esprit des commencements. Deux grands colloques se sont tenus à la Sorbonne, qui ont donné lieu à la publication de deux petits ouvrages bien oubliés mais qui me semblent encore valoir quelque chose, l’un s’intitule L’économie est l’affaire de tous (Laval et Tassi, 2004), l’autre Enseigner l’entreprise (Laval et Tassi, 2005).

Outre tes travaux sur l’école, tu as toujours eu comme souci d’ancrer ton travail au plus près des luttes, et notamment tu apportes une grande importance au syndicalisme puisque tu as organisé des séminaires à l’institut de la FSU et publié des articles dans la revue Idées économiques et sociales (ancêtre de RessourSES, e. g. Laval, 1996). Peux-tu nous expliquer d’où vient ce souci de « vulgariser » (le mot est impropre sans doute) tes travaux ?

Je n’ai jamais eu le souci de « vulgariser » des recherches savantes. Ce schéma « descendant » ne me correspond pas du tout. Je ne suis pas « fait » pour fonctionner comme ça, je suis resté longtemps un enseignant de lycée, et je ne suis devenu universitaire qu’en 2011, par une sorte de miracle institutionnel qui m’a fait passer directement de professeur de lycée à professeur d’université. J’avais alors 58 ans. L’essentiel de mon travail de recherche s’est effectué en dehors ou dans les marges de l’université, qui n’était pas pressée de m’accueillir et que je n’étais pas pressé non plus d’intégrer. Je vois plutôt mon travail comme un continuum entre des recherches théoriques, parfois je l’avoue, assez pointues, et des recherches plus empiriques et plus « branchées » sur les problèmes qui se posent dans l’action syndicale ou autre. Mais je veux croire que tout ce que j’ai fait a une signification et une portée qui concernent les luttes. Je me suis engagé dans ce que j’ai appelé la « recherche syndicale » pour plusieurs raisons. D’abord la production de connaissances n’est pas le monopole des institutions académiques. Les acteurs des luttes doivent et peuvent être en même temps des créateurs d’idées, d’analyses, de concepts. Ensuite, cette production passe par la création de lieux institutionnels au sein des syndicats qui permettent la prise de distance et l’indépendance de ce travail de recherche syndicale par rapport aux « lignes de l’organisation ». Enfin, cette recherche doit être vraiment collective et doit inventer ses propres formes et méthodes de travail collectif. Et j’ajoute que cette recherche syndicale doit être à mes yeux un instrument d’auto-réflexivité du syndicalisme, ce que nous avons tenté dans la dernière période avec une série d’ouvrages sur le syndicalisme et les mouvements alternatifs : Demain le syndicalisme (Barnier et al., 2016), N’attendons pas la fin du monde (Laval et Vergne, 2019), Le syndicalisme en commun (Barnier et al., 2021), chez Syllepse.

Tu as rédigé dans un numéro du MAUSS consacré à l’éducation un article dans lequel tu esquisses une théorie de l’éducation à l’aune du « paradigme du don » (Laval, 2006). Peux-tu revenir sur cet article et plus généralement sur ton travail autour des questions pédagogiques et éducatives ?

Parallèlement à l’analyse critique des processus néolibéraux de transformation de l’école, j’ai toujours voulu me situer du côté d’une éducation réellement démocratique. J’ai d’abord examiné les différents projets d’enseignement de la science économique et de la science sociale depuis le milieu du XVIIIe siècle. C’est une vieille histoire, qui reste largement ignorée. Les Physiocrates, les Écossais, Say, Bentham ont développé des conceptions extrêmement intéressantes quant à la façon de diffuser la nouvelle science de la société, qui sont évidemment très problématiques. Mais mon attention principale s’est portée sur Condorcet, le grand théoricien de la mathématique sociale, et sur la manière dont il intègre les savoirs sur la société dans son projet d’Instruction publique. L’histoire des SES doit être resituée dans cette perspective longue. Enseigner la société, de façon ouverte, plurielle, non dogmatique, est pour moi un projet qui est vraiment né au moment de la Révolution française.

Ce travail archéologique est une première pierre que j’ai voulu poser dans une réflexion plus générale sur l’éducation qui a trouvé son aboutissement provisoire dans un livre co-écrit avec Francis Vergne intitulé Éducation démocratique (Laval et Vergne, 2021). C’est un livre de « propositions offensives » dans la perspective d’un système éducatif approprié à une société elle-même démocratique. Mais avant cela, il y a eu une série de travaux et de réflexions sur l’histoire de l’éducation, et notamment sur les théoriciens qui ont pris la question sous un angle social et politique. Avec mes amis Gilles Candar et Guy Dreux et la regrettée Madeleine Rebérioux nous avons publié une anthologie des écrits de Jaurès sur l’éducation (Jaurès, 2005), et puis par la suite le premier volume d’un ouvrage collectif Éducation et socialismes au XIXe siècle (Candar et al., 2018). Nous travaillons actuellement sur un deuxième volume Éducation et socialismes au XXe siècle.

C’est parmi cet ensemble de travaux, que j’ai formulé de façon extrêmement rapide quelques analyses sur l’éducation selon la logique de la réciprocité telle qu’elle a été formulée par Mauss et reprise par Lévi-Strauss. La sociologie a pris l’habitude de prendre la question éducative sous l’angle de la « reproduction sociale », une démarche très féconde comme on sait. Mais sous un angle anthropologique, la dimension de la réciprocité intergénérationnelle, fonctionnant selon un contre-don différé vers la génération suivante me paraît pouvoir rendre compte de certaines impasses éducatives dans une civilisation capitaliste qui voit l’éducation comme un investissement rentable et perd de vue la dette symbolique envers les générations.

Au regard des bouleversements écologiques en cours, et en lien avec ton ouvrage sur les communs (Dardot et Laval, 2014), estimes-tu qu’il est nécessaire de faire une bifurcation pédagogique dans l’enseignement de ces questions écologiques, notamment en SES ?

C’est le sens que nous donnons dans Éducation démocratique à l’exigence d’une nouvelle culture commune à l’époque de l’Anthropocène. La bifurcation dont tu parles, elle a peut-être lieu (enfin !) dans la société, elle a lieu sûrement aujourd’hui par la redistribution des frontières entre savoirs. L’idée même d’une imbrication des processus naturels et des processus sociaux suppose que la science sociale change, tout comme les sciences de la nature, et même que des savoirs nouveaux apparaissent. Dans l’école démocratique de l’avenir, je suis certain que l’ensemble des questions relatives à l’habitabilité sur terre seront au cœur de l’enseignement. Dans l’ouvrage nous insistons beaucoup sur le lien entre démocratie et les dimensions écologique et féministe de l’enseignement. Je n’ai évidemment pas le temps de développer ici. Mais je m’aperçois que je n’ai pas tout à fait répondu à la question. Oui bien sûr il est temps que les communs fassent leur entrée dans les SES. Ils ont déjà pénétré les départements d’économie, de droit, de science politique. Ce serait bien malheureux de les exclure du secondaire. Les y faire entrer en les liant à l’écologie me semble une excellente idée.

Quand on fait le bilan de tes recherches, on a toujours l’impression que l’une des grandes questions à laquelle tu essaies de répondre, c’est celle de la Révolution. Mais surtout, tu sembles hanté (comme beaucoup de gens à gauche je pense) par les tensions qui existent entre le marxisme-léninisme et la pensée libertaire. Tu sembles préoccupé par le tournant dirigiste ou autoritaire qu’ont souvent pris la plupart des révolutions qui s’inspiraient du marxisme. Peux-tu revenir sur ces questions ?

Oui la question d’une rupture avec l’ordre existant est inséparable de mon travail. Mais la critique n’est-elle pas une bonne porte d’entrée dans la connaissance de la société ? C’est en tout cas ce que beaucoup de fondateurs pensaient, même Weber ! Révolution ? Le mot ne fait plus peur. Macron en a fait son texte-programme en 2017. On est tenté d’éviter le terme tellement il a été édulcoré. En tout cas, on n’a depuis longtemps jamais autant parlé d’une rupture avec l’ordre existant, même s’il y a beaucoup de paroles en l’air et peu de stratégies réelles. Mais tu as raison, nous ne pouvons nous débarrasser du problème qu’on pourrait résumer par la formule de Trotsky : la Révolution trahie. Mais comment l’aborder ? En invoquant des « circonstances défavorables »,un « environnement hostile », des « erreurs », des « déviations » ? Avec Dardot, nous nous sommes refusés à ce genre de facilités dans le retour que nous avons fait en 2018 sur la révolution russe (L’ombre d’octobre, Dardot et Laval, 2018). À nos yeux, la question centrale, c’est celle de l’État en Occident et de son principe constitutif, la souveraineté (Dardot et Laval, 2020). Les anarchistes et les marxistes l’ont esquivé, ou plutôt s’en sont délestés trop aisément, et elle leur est bien sûr revenue systématiquement dans le dos. La trahison assez systématique de la révolution tient au blocage et à l’écrasement des logiques et des institutions démocratiques par le principe même de l’État, qui est la domination d’un groupe politico-administratif sur la société. La conciliation de la démocratie pensée comme auto-gouvernement de la société et l’exercice d’un « pouvoir souverain » qui s’exerce par le moyen d’administrations est-elle possible ? Quand bien même on parlerait de « souveraineté du peuple », c’est la véritable question à se poser dans l’optique d’une révolution authentiquement démocratique.

De façon, peut-être paradoxale, tu sembles plus reconnu à l’étranger, et notamment en Amérique du Sud, qu’en France. Pourquoi, à ton avis ? Le fait que tu sois devenu universitaire assez tard pourrait-il expliquer ce manque paradoxal de reconnaissance en France ?

Au fond, ce n’est pas si paradoxal. On devrait prendre plus au sérieux la maxime de Jésus : « nul n’est prophète en son pays ». Si on laisse de côté le « prophétisme », il y a là une profonde vérité sociologique, car c’est souvent la distance, non la proximité, qui fait qu’on est entendu et considéré. Je l’ai particulièrement bien observé dans bien des occasions professionnelles ou syndicales. Et puis, qu’est-ce que la reconnaissance au fond ? Et de quel prix se paie-t-elle ? Dans un champ de rivalité aussi dur que la vie intellectuelle nationale, il y a plusieurs stratégies possibles : la conquête des positions de pouvoir institutionnel, la recherche de la visibilité maximale à travers les médias, la constitution d’écoles ou d’écuries. Tout ça est terriblement énergivore et coûteux en temps. Pour ma part, j’ai toujours préféré à la fois le travail collectif, la discrétion, et même une certaine marginalité. Ce sont pour moi les conditions idéales du travail. Et si les articles et les livres que j’ai faits sont reçus par ceux qui en ont besoin, j’en suis content et satisfait. C’est ce qui s’est passé en Amérique latine. L’écho de mes travaux sur le néolibéralisme scolaire ou des écrits avec Pierre Dardot sur l’histoire du néolibéralisme s’explique d’abord parce qu’ils répondent à une curiosité réelle ancrée dans des réalités historiques et des processus en cours dans les différents pays où nous nous rendons régulièrement, notamment le Brésil.

Et actuellement, que prépares tu ?

Je termine un roman. C’est ma petite rupture personnelle avec les habitudes, et une réjouissance de retraité. Bon ou mauvais, je m’essaie et je m’amuse. À part ça, les chantiers ne manquent pas : les communs, l’écologie, et la révolution sont des questions qui restent pour moi toujours ouvertes. Le collectif dans lequel je travaille, le Groupe d’études sur le néolibéralisme et les alternatives (GENA) est toujours très actif. De plus jeunes prennent le relais, c’est l’essentiel.

Notes

[1] L’idée est par exemple avancée par Alain Beitone (2019). Le concept de « capital militant » a été élaboré par Frédérique Matonti et Franck Poupeau (2004).

Bibliographie

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